· 

Le sucre : intestin, glycémie et performance

 

Comment ça, un 2e cerveau ? L’image est pourtant de plus en plus populaire : oui, nos 7 mètres intestinaux seraient l’une des clefs de notre métabolisme…et de nos performances, voire du bonheur. Siège de nos émotions, résidence du microbiote, et tapi de 200 millions de neurones. Alors, imaginez l’ensemble chez un sportif : shaker total, mauvaises habitudes alimentaires, et surtout sucre à gogo sur des heures de montages russes ? Dynamite en perspective ! Filtre et utilisateur central de nos glucides (entre autres), l’heure est au chouchoutage et aux…explications.

Ouvrons donc un zoom, sur l’organe clef de la santé ET de la performance. Douleurs articulaires inexpliquées ? Pensez intestin. Impossible de passer la barre de l’ultra ? Pensez intestin. Stress, intolérances ou plafonnement des performances ? pensons intestin…Mais davantage : ces sucres lents/progressifs/rapides/complexes…..Pourquoi ne me font-ils plus aucun effet ?

 

Nom de code : intestin. Mission ?

L'intestin est un organe qui nous permet d'absorber en particulier le sucre que nous ingérons, mais aussi les acides gras, les acides aminés des protéines, les vitamines, les minéraux…etc. Filtre à particule, grand ordonnateur de nos nutriments, centrale de tri et dispatcheur du meilleur de ce que l’on ingère (et du moins bon).

Ce brave intestin, il est un peu comme un muscle : capacités limitées. Capacité de digestion – et capacité d'absorption. On ne peut donc pas lui donner « à manger » n'importe quoi comme sucre, ni n'importe comment, n'importe quelle quantité. Il faut respecter sa puissance de travail. (nota : cette capacité, on peut toutefois l’entrainer, sans dépasser certaines limites…mais nous en reparlerons dans un prochain sujet). Vous avez dit capacités ?

 

  1. La capacité de digestion

Lors de la course, la capacité de digestion diminue. Il vaut donc mieux amener des sucres les plus simples possible, et qui demanderont l'effort de digestion le plus faible possible. Sucre blanc, jus de fruit, miel…etc, dilués dans de l'eau. Certains seront fans de pain blanc tout bête + chevre + miel, ou du bon vieux jambon beurre…à nuancer et à tester avant tout, comme toujours. Et puis l’on parle de matières grasses, et de lait, donc allons-y progressivement, avec le bon vieux ravito charcuterie.

Priorité ? la qualité des sucres. Et évitons le solide si l'épreuve est intense car l'estomac aura du mal à faire son travail de broyage, malaxage. Souvenir de cette fameuse « vidange intestinale » qui n’était toujours pas achevée lors de votre départ à 6h ? Il vous fallait 3h en 2010, 4h en 2015, et maintenant près de 5h pour vous sentir à peu près « intestinalement ready » à courir ?...Capacité, et timing.

 

  1. Je veux ma boisson ISO/HYPO/HYPER-tonique ! : La concentration en sucre.

  • « Avant l’effort, vous prendrez 40 cl de notre boisson BEFORE SUFFERING à raison d’une gorgée de 12,3 cl toutes les minutes ».

  • « Pendant l’effort, optez pour notre boisson FULL PAIN 2000, à raison d’une gorgée de 33 cl toutes les 5’ ».

  • « Après l’effort, n’oubliez pas de bien récupérer, grace à notre boisson AFTER CRASH à raison d’une gorgée de…. ».

Têtes de gondoles, magazines et shop du coin ? Nous sommes cernés : on a tous entendu parler de boisson hypotonique, hypertonique et isotonique ! Vous étiez stressés sur la start line ? Reprenez un shot de boisson d’attente, qu’il disait. Stop, et lumières :

  • Une boisson isotonique : a la même concentration en sucre, sel, minéraux que le milieu interne.

  • Une boisson hypertonique : a une concentration supérieure à celle du milieu interne. Notre corps a une tendance à niveler les concentrations dans tous les compartiments corporels. Donc si on ingère une boisson hypertonique, cela va créer un appel d'eau dans l'intestin pour diluer cette boisson et créer un équilibre de concentrations. D'où … une diarrhée. Pas cool…pendant une course. On prendra donc plutôt des boissons isotoniques ou hypotoniques, ceci aidant au contraire à l'hydratation des tissus. Le choix de la concentration va dépendre de la distance (augmentation de la concentration avec la distance) et de la chaleur (diminution de la concentration avec la chaleur + apport de sel à 1 g/l).

  • Une boisson hypotonique : a une concentration en sucre, sel, minéraux…inférieure à celle du milieu interne.

  1. Intestin : petit ou gros débit de sucre ?

L'intestin a ses limites en termes de digestion et concentration, mais aussi de débit.

Explications : Le passage du sucre de l'intestin au sang se fait par des petits canaux, et des scientifiques ont calculé que le débit maximum de ces petits canaux, pour un athlète ayant un intestin entrainé, est de 90 g/h. Oui mais, pas n'importe quels sucres ! Complication ? Nenni, explications : 60 g/h pour le glucose et 30 g/h pour le fructose. Alors ça veut dire qu'il faut apporter une boisson, hypo ou isotonique, avec un maximum de 90 g de glucides par heure et un rapport Glucose/Fructose de 2/1. Houla, prise de tête me direz-vous ! Pas tant que ça, car la nature est bien faite, et ça c’est la 1ere bonne nouvelle : le corps affirmera toujours sa propre régulation et ses réflexes limitateurs – qu’ils soient stricts, ou le plus souvent préventifs et doux (il est ainsi le corps : plutôt à négocier, avant de cogner !). La seconde : on vous proposera 3 recettes active/easy/funny…dans un prochain article.

  1. Bref : Que retenir ?

  • Prendre soin : avant toute révolution, préserver son intestin au quotidien. Ça commence par respecter ses sensations digestives, ses tolérances d'aliments et ne pas vouloir aller trop vite. Un rythme de course trop élevé entraînant une diminution de l'irrigation sanguine de l'intestin et des difficultés de digestion.

  • Le considérer comme un organe de la performance : au même titre que les muscles et le système cardio respiratoire, il faut le « muscler » lors des entraînements ce petit intestin...

  • Ne pas imiter les autres : si votre voisin digère bien la tartiflette avant la course c'est son affaire, et ce n'est peut être pas votre cas... Si vous ne voulez pas avoir à trouver un buisson de toute urgence au bout de 500 m de course, évitez d'imiter ce que font d'autres personnes bien intentionnées...

  • Bien sélectionner ses sources de glucides avec un rapport de 2/1 entre glucose et fructose, surtout sur du long.

  • Boire régulièrement une boisson iso ou hypotonique.

  • Ne pas expérimenter le jour J : damnation du « nouveau gel » ou de la boisson « high perf’ » sans essai préalable, qui se font cocktails à aigreurs, ou hauts-le-cœur-garantis lors de LA compétition qui était importante.

  • Ne pas (trop)…gamberger.

 

Par Julien Gilleron. Avec la Collaboration de : Sylvain Roussé - Diététicien Nutritionniste – DIU Nutrition et Activité physique (performance sportive et santé). Coureur patenté et montagnard passionné, Sylvain creuse la trilogie diététique-compétition-santé à Thorens Glières. + d’infos : sylvain.rousse.diet@free.fr.

 

Écrire commentaire

Commentaires: 0